La “tradition” de la prise d’otages
L’enlèvement de cinq collaborateurs français d’Areva et de Satom, jeudi dernier au Niger, après l’assassinat de notre compatriote Michel Germaneau au Mali en juillet, nous sont présentés par la presse et le gouvernement français comme une véritable “déclaration de guerre” des réseaux maghrébins d’Al Quaeda, inédite par son ampleur et sa violence dans l’histoire de nos relations avec le continent africain. C’est oublier que la pratique du rapt est très antérieure, dans le monde arabo-musulman, à l’avènement des républiques ou des réseaux armés ”islamistes” de l’ère post-coloniale : elle a plus de mille ans.
Sur les terres où l’esclavage a conservé sa définition traditionnelle – comme pour ces petits Noirs vendus chaque année par leurs familles sur le chemin de La Mecque, afin de subvenir aux dépenses du “pèlerinage » –, la prise d’otages étrangers constitue une tradition historique et culturelle ancestrale. Pourquoi les médias font-ils semblant de la découvrir aujourd’hui comme une nouvelle monstruosité ?
Nous avons eu, en France, plusieurs dizaines de milliers de frères chrétiens à arracher aux ravisseurs d’une terre d’Islam. C’était dans les années soixante et soixante-dix. On les appelait pudiquement, mais improprement, les “disparus d’Algérie”. Chacun a préféré les oublier : le gouvernement français, pour ne pas reconnaître l’atroce marché humain dont fut assorti l’abandon des trois départements français d’Afrique du Nord ; les médias, parce que l’honneur et la solidarité nationale ne leur sont plus des sentiments naturels…
On focalise avec effroi sur le rapt de quelques Occidentaux – journalistes, universitaires, touristes, ingénieurs expatriés – mais c’est l’arbre qui cache la forêt : la vieille barbarie des chefs de bande du Proche et du Moyen-Orient, dès qu’elle n’est plus tenue par une main de fer, prend des otages comme elle respire, c’est-à-dire pour des raisons indépendantes de sa volonté. Elle est dans la plus pure expression de son être collectif, et d’un sens de l’Histoire qu’on croyait assagi, lorsqu’elle emprisonne, assassine ou rançonne les voyageurs étrangers.
Nous avons réveillé ce fanatisme en chassant du Proche et du Moyen Orient les mini-dictatures éclairées favorables à la culture et au mode de vie de l’Occident. Mais il ne sert à rien de vouloir opposer maintenant notre conception de la “justice”, de la “démocratie” et des ”droits-de-l’homme” à des interlocuteurs qui ne reconnaissent aucune des valeurs de notre civilisation.
Gabriel de Seinemont
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